11 mai 2016

Abeilles et néonicotinoïdes...



"Le paradoxe de la Reine rouge

LE MONDE | 09.05.2016 à 06h38 | Par Stéphane Foucart

Mardi 10 mai, le Sénat examinera le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Les sénateurs devraient donc se colleter avec lépineuse question des insecticides tueurs dabeilles, les désormais célèbres néonicotinoïdes « néonics » pour les intimes. En létat, le texte voté en deuxième lecture par lAssemblée prévoit linterdiction de ces substances dès 2018. Rien nest cependant acquis, tant les intérêts contrariés par cette disposition sagitent dans la coulisse pour lui faire la peau.

Ils sont dailleurs parvenus à gagner loreille du ministre de lagriculture, de lagroalimentaire et de la forêt. Stéphane Le Foll avait écrit aux députés, mi-mars, pour leur demander de ne pas voter linterdiction des néonics. A lappui de cette demande, le ministre faisait valoir plusieurs arguments, comme, notamment, labsence dalternatives moins nocives ou la distorsion de concurrence introduite par une telle interdiction. Enfin, M. Le Foll précisait vouloir réduire lexposition des abeilles à ces substances, sans pour autant les interdire.

Que penser de cet argumentaire ? Jusquà présent, aucune des différentes restrictions dutilisation de ces substances na produit la moindre perte de rendement. En 2012, juste avant que lEurope ninstaure un moratoire partiel sur certains usages de quelques-unes de ces molécules, lagro-industrie avait prophétisé un Armageddon sur le Vieux continent en cas de restrictions : des dizaines de milliers demplois et des milliards deuros devaient être perdus mais rien de cela ne sest produit.
Une course effrénée au surplace

En réalité, le modèle agricole dominant semble sujet au paradoxe de la Reine rouge. Dans une scène fameuse du livre de Lewis Caroll De lautre côté du miroir, la Reine rouge explique à Alice que, dans le monde où elle a atterri, il faut sans cesse accélérer pour rester immobile. Lagriculture est lancée dans une telle course effrénée au surplace. A mesure que le temps passe, chaque nouvelle innovation produit des effets bénéfiques toujours plus faibles et des dégâts toujours plus importants, qui sont à leur tour corrigés par dautres innovations, venant elles aussi avec leurs externalités Résultat : les rendements ne stagnent quau prix dune escalade chimique et technique sans fin.

Car, en France, lutilisation de pesticides croît ainsi sans fléchir mais les rendements de lorge, du blé et du maïs naugmentent plus depuis le milieu des années 1990, selon lOrganisation des Nations unies pour lalimentation et lagriculture. Ceux du colza plafonnent depuis le milieu des années 1980. Ceux du tournesol depuis la fin des années 1970.

Ainsi, au début des années 1990 soit avant la mise sur le marché des fameux néonics , les rendements des grandes cultures françaises nétaient globalement pas très différents de ceux daujourdhui, mais la production de miel (un indicateur de la santé des pollinisateurs) était alors plus de trois fois supérieure à lactuelle, selon lUnion nationale de lapiculture française
Nous avons perdu le contrôle de cette technologie

Quant à poursuivre lutilisation des néonics en les tenant éloignés des abeilles et autres bourdons, cest une idée séduisante mais irréaliste. La raison en est simple. Ces substances sont essentiellement utilisées en traitement préventif de semences. Les graines sont enrobées avant dêtre semées, mais la plante nabsorbe quune petite partie du produit appliqué. Environ 90 % des quantités utilisées demeurent dans les sols, y persistent plusieurs années et saccumulent donc dangereusement dune année sur lautre.

Dans une étude publiée fin 2015 dans la revue Proceedings of the Royal Society B, des chercheurs français racontent ainsi avoir eu la surprise de découvrir de l'imidaclopride (un néonic) dans le nectar de colza nayant pas été traité avec cette substance. Pourtant, celle-ci sy trouvait à des taux comparables voire supérieurs à ceux du thiaméthoxame (un autre néonic) qui, lui, leur avait bien été administré Dans Environmental Science & Technology, des chercheurs britanniques ont aussi récemment montré que les fleurs sauvages, qui poussent autour des champs traités, absorbent des néonics et sont également une source importante de contamination pour les abeilles.

Espérer préserver les pollinisateurs en gardant les néonics est impossible. Même sils étaient interdits dès demain, ils continueraient à produire leurs effets de nombreuses années durant. Disons les choses simplement : nous avons perdu le contrôle de cette technologie." En savoir plus sur (abonnés) : http://www.lemonde.fr/planete/article/2016/05/09/le-paradoxe-de-la-reine-rouge_4915714_3244.html#Y6vo2YWezF5f0hXO.99




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